HabsolumentFan
La goutte qui ferait déborder le vase
 

La goutte qui ferait déborder le vase

Des annonces? NON. MERCI.

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Quand j’étais plus jeune, les uniformes sportifs européens me faisaient beaucoup rigoler. Que cela soit au soccer, au basketball ou au rugby, les équipes sportives professionnelles en Europe ont toutes un dénominateur commun majoritairement absent en Amérique du Nord : de la publicité sur les uniformes. Maintenant que je suis un jeune adulte et que je comprends le rôle de la publicité dans la société, je ne trouve plus ça amusant du tout, et l’idée d’amener le concept dans la LNH.

Le 17 août dernier, Rick Westhead du réseau TSN annonçait que Adidas venait d’obtenir le contrat pour habiller les équipes de la LNH. Westhead ajoutait que cette transition pourrait accélérer l’arrivée d’annonces sur les chandails de la ligue.

Dans la NBA, on drible avec l’idée depuis plusieurs années déjà. La première réaction de plusieurs amateurs a été sans équivoque : les partisans ne veulent pas de Logo Mcdonald’s ou Ford sur les joueurs. Avec le recul, on constate que pour des raisons bien plus qu’esthétiques, cette idée reste tout autant terrifiante.

En Europe, les équipes de hockey professionnelles tapissent leurs joueurs de logo. Dans les ligues mineures nord-américaines de hockey et de basketball, on commence à voir apparaître de petits logos sur certains chandails, sans plus. Ceci a du sens pour les petites équipes qui doivent parfois simplement réussir à survivre. La NBA et la LNH ont cependant quelque chose que ces ligues, même celles d’Europe, n’ont pas : l’attrait des Lebron James, Kobe Bryant et Sidney Crosby de ce monde. Ces joueurs rapportent des profits d’une somme astronomiques pour les ligues que cela soit en vente de chandail où en attirant les partisans dans les gradins.

Même les équipes de plus petits marchés n’ont pas à se battre pour leur survie comme le font les équipes mineures. Certes, des organisations comme les Panthers de la Floride n’attirent pas les foules, mais ils ont tout de même une valeur de 240 millions de dollars selon Forbes. De plus, les Panthers ont déjà de la difficulté à vendre tous leurs panneaux publicitaire dans l’aréna, quelle entreprise payerait pour voir son nom sur son chandail?

C’est vrai, d’autres équipes, principalement celles évoluant dans de gros marchés, n’auraient pas ce problème et pourraient faire monter les enchères chez les compagnies désireuses d’acheter leur chandail. Il y a un mot pour cela : avidité, ou greed en anglais.

Les Maple Leafs de Toronto ont une valeur de 1,1 milliard de dollars. Dans la NBA, les Knicks de New York valent pour leur part 1,4 milliard. Ces équipes n’ont-elles pas déjà les poches pleines? La plupart des amateurs de sport n’ont même pas les moyens de s’imaginer à quoi ressemblent un milliard de dollars. Maintenant, on demanderait à ces mêmes amateurs de devoir enduré le logo de Molson sur le chandail du Canadien de Montréal?

Car il s’agit d’une autre problématique. Sans même observer le point de vue économique, celui de la tradition est ce qui vient égratigner la conscience des partisans. Le CH de Montréal, la camisole verte des Celtics de Boston, les rayures des Yankees de New York, ce sont tous des uniformes ancrés dans la culture populaire et auxquels les amateurs accordent une importance capitale, quasi religieux par endroit. Si on couvre ces merveilles de la mode sportive en publicité, Maurice Richard qui a si fièrement porté le bleu blanc rouge pourrait bien se retourner dans sa tombe, on diminue les uniformes, seule symbolique à résister au capitalisme sauvage dans le monde sportif, à rien de moins qu’un autre panneau publicitaire.

Le soccer, pas un exemple

J’en entends déjà plusieurs avoir une réplique spontanée : les équipes de soccer européennes le font déjà. Certes, et celles-ci font beaucoup plus d’argent que celles de hockey ou de basketball en Amérique du Nord. Le Real Madrid, une des équipes sportives les plus lucratives de la planète, a une valeur de 3,44 milliards de dollars toujours selon Forbes. Il existe cependant une différence majeure entre les matchs de soccer et ceux de basketball et de hockey. Il n’y a pas d’annonces publicitaires durant les rencontres de soccer. La publicité sur les chandails est donc la façon trouvée par les propriétaires pour aller chercher des partenaires et commanditaires.

Parfait? Non. Mieux? Certainement. Chers propriétaires de la LNH et de la NBA, vous voulez tapisser Lebron James de logos d’autres compagnies déjà multimillionnaires, voire milliardaires comme les vôtres. Mettez un terme aux longues pauses durant le jeu. Vous voulez voir P.K. Subban avec un gros M jaune sur son merveilleux uniforme porté par des légendes qui lui ont tendu le flambeau, les bras meurtris. Cessez de rendre un match de 60 minutes en spectacle de 3h.

L’année dernière, les propriétaires de la LNH ont voté contre cette option. Cependant, les nouveaux propos de Westhead et le simple fait qu’ils ont eu à tenir un vote sur le sujet prouve une chose, ils y pensent fortement, et on pourrait s’en approcher dangereusement.

La journée où je verrai Carey Price forcé d’arborer le logo Molson sur son chandail pourrait être la goutte qui fera déborder le vase. Le peu d’intégrité toujours dans le sport aujourd’hui passe en grande partie par la tradition que symbolise plusieurs de ces uniformes, en faire des panneaux publicitaires serait oublié pour de bon l’époque où Maurice Richard devait travailler dans une usine de jour pour survivre, et rire en plein visage des amateurs qui doivent toujours payer 12 dollars au Centre Bell pour ladite Molson.

Crédit d'image: Keystone Press Agency